-Josh ? Plusieurs fois mon surnom avait retenti, plusieurs fois et pourtant pas un instant je n'ai déporté les yeux du point que je fixais pour observer un de mes amis. Sérieux JJ, tu peux pas attendre plus longtemps, le chef va pester d'ici dix minutes.

-Elle va venir Drew, je sais qu'elle va venir... Soufflais-je encore, persuadé avoir vu dans ses prunelles brunes, la veille à près de minuit, une lueur qui m'intimait qu'elle ne l'épouserait pas malgré sa promesse, qu'elle viendrait, que je n'aurai peut-être plus à partir. Laisse moi encore deux minutes, deux petites minutes je demande pas la lune, juste qu'elle vienne.

Drew déposa la main sur mon épaule en un soupir avant de rejoindre l'appareil où plusieurs hommes, en partance pour un autre pays où nous devions secourir quelques personnes en difficulté, attendaient que je daigne me bouger, oublier son visage, ses yeux, et cette promesse inaudible que j'avais cru voir briller dans ses deux iris qui ne quitteraient jamais mon esprit. Les secondes filèrent, une minute... puis l'écoulement du sablier toucha à sa fin jusqu'à ce que la voix de l'instructeur résonne à m'en faire frémir. Cette fois je n'avais plus le choix, plus besoin d'attendre, bercé d'illusions depuis la veille, je n'avais simplement pas envisagé qu'elle le choisirait lui... et, pourtant, si je lui avais assuré l'importance des sentiments qu'elle logeait dans mon cœur depuis l'enfance, sans doute n'aurais-je été à ma place en ce jour. Humidifiant mes lèvres en quittant ce point fixe du regard, pour le planter sur mes mains retenant fermement le médaillon qu'elle m'avait offert et ne m'ayant jamais quitté, j'ai tourné les talons puis me suis engouffré dans l'appareil. Ses souvenirs plein la tête, sa voix encore bien présente, ses sourires et larmes tout aussi vivaces que si elle avait été à la place de Drew à mes côtés...

Le reste n'a plus vraiment de sens depuis ce jour, je fais simplement ce qu'on m'ordonne avec attention et concentration, j'ai survécu à bien des choses, tenté d'aider au mieux que je le pouvais, toujours dans l'espoir de la retrouver dans l'un de ces camps où les gens s'amassaient suite à la terreur s'étant déversée sur le monde, en vain... Elle me hante chaque jour que Dieu fait, je l'espère en vie bien que je tâche de ne plus rêver autant que lorsque j'ai fait le pied de grue plus d'une demi heure sur le tarmac, elle est la première chose à laquelle je pense en ouvrant les yeux et la dernière vers qui je m'évade lorsque les songes m'emportent à la nuit tombée... La vie est peut-être redevenue celle que tous attendaient, celle que tous espéraient mais, sans elle, la mienne n'est qu'une infime partie d’existence sans trop d'importance comparé à celle qu'elle avait pour moi. J'aurai du lui dire, j'aurai du lui hurler, j'ai peut-être eu tort, ou raison, peut-être a-t-elle eu une vie bercée d'amour et de tendresse, peut-être est-elle présente sans que je le sache, une ombre, un spectre ou que sais-je encore... Une chose est sûre pourtant, je pense que jamais je ne me ferai de raison quant à elle, celle que je n'ai su capturer quand le moment était venu de le faire. On vit tous avec des regrets, les miens me rongent mais qui suis-je pour sombrer et ne plus servir ce en quoi je crois ?