Je n'ai jamais été très loquasse, jamais très expressif mais, ce qu'il y avait de plus étrange, était sans doute que la donzelle avec qui je convolais ne l'était pas trop non plus... On a tout de même était jusqu'à faire un môme, une petite princesse que j'aurai porté plus haut que le ciel si j'avais eu les échasses assez grandes, un ange adorable, tout comme sa mère, pour qui je me serai volontiers arraché le cœur de la poitrine afin de les épargner toutes deux. On sort parfois ce genre de chose, sûrement par qu'on sait au fond de nous que jamais une telle merde ne nous tombera sur le coin de la gueule, qu'on s'imagine insubmersible, différent de ceux qui caressent la mort plus tôt qu'à leur tour mais, pourtant quand cette satanée faucheuse se présente à vous, en divers gugus que vous avez fréquenté pour la plupart, avec qui vous vous êtes marré, vous avez bossé, avec qui vous avez pris un verre la veille, cette phrase aussi belle soit elle, vous pète à la gueule au point de clouer vos godasses sur place. C'est exactement le ressenti que j'ai de mon propre vécu car, quand la merde a explosé à la face de notre cher mère la terre, que j'ai vu mes propres potes agripper ma gamine et sa mère, mon temps de réaction n'a pas été à hauteur de la valeur qu'elles avaient à mes yeux...

C'était il y a maintenant sept ans, sept ans que je remue cette scène en quelques cauchemars... Des années sous la couleur du sang qui ne me quitte jamais vraiment, le sang de leur mort, leur propre sang, et même si je ne suis à l'origine de leur disparition, j'ai tout de même joué un rôle dans leur mort, celui du mec incapable de comprendre, le mec qui a agi bien trop tard pour les voir mourir à petit feu. Cela fait sept ans que je ne suis plus vraiment le même, que je porte le blouson que toutes deux m'avaient offert pour la fête des pères, les ailes sur le cuir les représentent, comme elles représentent celui que je ne serai certainement plus. On dit qu'on apprend de nos erreurs et croyez moi, quand celle-ci est impardonnable, vous avez intérêt à rapidement mettre le nez dans les leçons à en tirer... grâce à ça, j'ai épargné une vie, ce que j'aurai du faire pour elles, et bien que solitaire, ce sont les mots de cette fille, au fil des jours, qui m'ont convaincu de l'aider... Sans doute car j'aurai aimé l'être afin de préserver les miens.