Je suis l'aînée d'une fratrie de deux enfants, j'ai donc un frère Aaron, j'avais un père et une mère tout aussi formidables que lui, malheureusement, les faits lugubres s'étant étendus sur cinq années, nous les ont retiré comme beaucoup d'autres proches. Avant tout cela, j'étais aussi une épouse, celle d'un homme que j'imaginais capable de finir ses jours auprès de moi, capable de m'aimer jusqu'à nos derniers souffles, de m'épauler et de m'offrir l'opportunité d'agrandir notre précieuse fratrie. Je l'ai aimé, je l'aime encore, et malgré le mal ressenti lorsque j'ai poussé la porte de sortie pour ne jamais plus la franchir, je l'aimerai sans doute jusqu'à mon dernier soupir, comme j'en ai fait le vœux, devant ma famille et la sienne bien des années plus tôt. Mais, comme toute histoire, une tâche sombre est venue éclaboussée un tableau idyllique. Suite à cela, il a changé, m'a repoussé, m'a presque reproché de vouloir l'aider, de le soutenir, alors que je ne faisais que ce que je lui avais juré devant Dieu, jusqu'à me forcer à partir, à lui rendre son précieux nom mais garder jalousement chaque sentiment fort éprouvé à son égard... Seule, sans plus sa main tendue, j'ai du redresser les épaules, être forte, puis voir la vie s'écrouler autour de nous et survivre.

Auprès de moi j'avais encore mon frère et sa famille tout aussi éclatée, mais tout de même soudée, pour me permettre de ne pas baisser les bras, espérer que tout redeviendrait normal un jour, sans jamais pouvoir faire cicatriser le trou béant dans ma poitrine. C'est peut être pour cette raison que je n'ai su lutter contre le mal qui m'a touché un hiver, je n'en ai aucune idée mais, comme endolorie, et consciente que cet état m'était bénéfique car je ne ressentais plus rien, ni la douleur, ni tout autre sentiment propre à notre nature humaine, j'ai sombré dans un endroit où même la mort n'avait plus aucun impact. J'étais sereine, loin de tout, capable de frôler des doigts un endroit paisible où chaque être m'étant précieux était présent bien qu'il ne s'agissait que d'un long rêve dont beaucoup ne m'imaginaient pas sortir un jour... et pourtant....

Il y a un an, j'ai rouvert les yeux dans cette chambre d'hôpital, tout avait changé une fois de plus, trois ans s'étaient écoulés et la vie semblait avoir repris son cour... Les miens sont venus, m'ont serré dans leurs bras et alors que j'aurai du être plus heureuse, plus souriante, une unique personne manquait à l'appel, d'ailleurs, il manquait à l'appel depuis plus de dix ans... Autre que moi aurait pu faire cesser les saignements de son cœur en abandonnant, mais si cette seconde chance m'a tendu les bras, alors qu'il n'y avait plus aucun espoir, c'est sans doute que j'ai encore ma place en ce monde, une chose à accomplir, des gens à aimer et je ne suis personne pour aller contre, je compte bien vivre, sourire et, peut-être, oublier que je t'ai aimé à en saigner...